lundi 27 septembre 2010
Vampyres, par Vincent Martin (article publié dans Brain-Magazine)
Tu cherches le 06 de Buffy? Fonce à Harlem au QG des Hidden Shadows, un groupe de vampires version 2010. Au programme de leurs sorties au clair de lune: vêtements gothiques, techno hardcore et shots de sang! T'es sérieux? Par Vincent Martin.
Un couple d’amoureux fait route à travers la forêt. Au loin, les loups hurlent à la lune. Soudain, le moteur s’étouffe et le Kangoo s'arrête. Steve et Stacy décident alors de passer la nuit dans un manoir che-lou au sommet d'une colline. Minuit. Dans un nuage de fumigène, le vampire de l’affiche mord le cou de Stacy en soutif. Fin. La lumière revient dans la salle du Gaumont. En renfilant son Quechua, l’amateur d'hémoglobine peste et balance à la benne L'Officiel des spectacles. Good news: en 2010, certains New-Yorkais sont vampires pour de vrai et remplacent leur Perrier par de l’O négatif. La journée, ils sont livreurs, vendeurs, traders. Et la luit, ils sont.... vampyres.
Dans le hangar transformé en boite de nuit, des écolières en manque et des esclaves en cuir miment des scènes d’orgie romaine, sur fond de techno hardcore. Avec leurs redingotes en latex et leurs baggys trop larges, leurs hauts-de-forme victoriens et v'la les piercings, les vampyres d’aujourd’hui mélangent l’esthétique dark et le streetwear ado. Et quand minuit résonne au-dessus du dancefloor, la foule montre des crocs qu’on trouvait avant à la fin de Pif Gadget. « Être vampyre, c’est reprendre le pouvoir sur ta destinée. Le système n’est pas fait pour nous. C’est à nous de faire la différence, de montrer qu’au milieu de tout ce merdier et de toute cette hypocrisie, on peut réaliser quelque chose d’extraordinaire." T'as essayé la LCR? Et quand les gens normaux passent leurs soirées sur Chatroulette, les vampyres d'aujourd'hui occupent leurs crépuscules entre gros décibels, rituels invocateurs et transfusions sanguines. « On est 15 000 vampyres dans le monde -USA, Brésil, Japon... répartis en 500 maisons. Les maisons, c'est des clans, des genres de confrérie. A New York, t'en as plein: t'as la Panthion au Bronx, la Sahjaza au sud, les Hidden Shadows dans le Spanish Harlem... »
Les Hidden Shadows ont installé leur QG dans une école de karaté. Une fois par mois, le dojo remplace les posters de Bruce Lee par des crânes en plastoque ou des mygales en bocal: place aux soirées Bloodbath, « Bain de Sang » en anglais. A l'entrée, les videurs accueillent la foule. Parmi eux, les fondateurs des Hidden, Xanatos et Lord Zillah... Je vous ai pas trouvé sur pagesjaunes.fr, c'est normal? « Y'a de tout à ces soirées! Du son, des filles, des concours de tatouages, des concours de T.-shirt mouillés, sauf qu'on remplace la flotte par du sang. » Et le reste de l’année, les Hidden Shadows organisent des messes zar-bis en célébrant le Nouvel an le soir... d'Halloween. L'occasion aussi de recruter de nouveaux membres « On est très sélectifs sur les personnes qu'on fait rentrer dans la famille. En ce qui concerne les hommes, on veut des chevaliers, des soldats et des gentlemen. J’ai pratiqué les arts martiaux pendant trois ans. C’est une manière de conserver de la force, de la puissance au sein de notre famille. » Okééé, je vais vous laisser... Une fois dans la famille, le nouvel arrivant est initié aux poignées de main secrètes et aux règles de vie de l’Ordo Strigoi Vii, une bible vampyrique écrite il y a quinze ans par Father Sebastian, un ancien prothésiste dentaire, fondateur de la scène vampyrique « On épèle le mot vampyre avec un « y » pour nous différencier des pratiquants de jeux de rôles ou des créatures du cinéma fantastique. » Jusque là, je te suis. « Les Anciens m’ont confié la mission de parcourir le monde pour y créer des refuges où nos semblables pourront vivre sans avoir à se cacher et en paix avec le monde moderne. » En revanche, là... Dans la boutique Halloween Adventure à New York, Father Sebastian fabrique des prothèses en résine pour ses potos, des canines pointues à fixer sur les dents, comme un grill. « Tu as pleins de modèle: les Classic canines, les Double, l'Interview... » Total, les vampyres déboulent de leur cercueil en chêne massif pour se faire arranger des dentiers sur mesure, à 200 dollars pièce!
« Chacun d’entre nous possède des pouvoirs, à sa manière. Nous naissons tous avec un don. » D'après la bible vampyrique, les vampyres se rendraient compte de leur vraie nature après un traumatisme, genre la mort du cochon d'Inde deux jours avant Christmas. A partir de là, ils sont censés chercher de l'énergie et se recharger auprès d’autres humains. Rien de ouf, ils s'habillent en Dracula, rencontrent des gens, parlent avec eux et finissent au plumard. Facebook, quoi! « Certains groupes chassent le soir. Ils sortent pour pomper l’énergie des gens qu’ils croisent. Nous utilisons la communion. En échange, nous donnons du plaisir, de l’amour ou plus simplement, de l’attention. » Et quand une simple « communion » ne suffit pas, les vampyres de New York s'envoient un grand lait-fraise sorti d’une perfusion.
Dom Henrie co-présente l’émission Mad Mad House Sur Sci-Fi Channel, une télé réalité lancée en 2004: dix candidats dans une immense villa où les vampires en rut et les sorcières vaudoues remplacent « Ici la Voix ». Après neuf semaines de jeu, le dernier candidat repart avec un chèquos de 100 000 dollars. Il y a quelques années, avec son teint blafard et ses cheveux jusqu’aux fesses, Dom Henrie s'est offert un buzz en plein direct : devant les caméras, il s’enfile un verre de sang tiré des artères de Gina, sa copine planquée dans la coulisse. « Le sang est le plus beau cadeau qu’on puisse faire. Lorsque tu partages ton sang avec quelqu’un, tu partages toutes ses forces et toutes ses faiblesses. » Et tu viens de gagner... quinze jours all inclusive dans une aile de Ste Anne! Pourtant, les chefs de la scène vampyrique déconseillent à leurs membres de boire du sang à cause des maladies comme l’hépatite ou le sida. Pendant leurs soirées, des tracts circulent et demandent aux amateurs de limiter les perfusions à leur seul partenaire et d'utiliser des gants stériles. « Les crocs ne sont pas fait pour mordre. Pour boire du sang, j’utilise des cathéters, des scalpels ou des seringues et tous mes esclaves doivent passer des tests sanguins. Je conserve le sang dans de petites fioles. »
Des coutumes qui peuvent coûter cher. Nicolas C., surnommé le « vampyre de Paris », a passé huit ans en cabane à Poissy pour une affaire de meurtre il y a quinze ans. Sataniste, fasciné par le sang et les tueurs en série, il se décrit lui-même comme un vrai sataniste, en marge de la scène et des codes vampyriques. « Quand les enquêteurs ont fouillé mon appartement, ils ont trouvé des ossements humains qui pendaient au plafond, des vidéos d’horreur, des pornos SM, sans oublier les poches de sang dans le frigo. Je les avais volées à l’hôpital où je travaillais. »
En attendant, les vampyres de New York restent des pacifistes portés sur les soirées d’une sous-culture hors norme. Prochain grand rendez-vous des vampyres 2008, le 14 février pour la Saint-Valentin. Chéri, tu piques !
Un couple d’amoureux fait route à travers la forêt. Au loin, les loups hurlent à la lune. Soudain, le moteur s’étouffe et le Kangoo s'arrête. Steve et Stacy décident alors de passer la nuit dans un manoir che-lou au sommet d'une colline. Minuit. Dans un nuage de fumigène, le vampire de l’affiche mord le cou de Stacy en soutif. Fin. La lumière revient dans la salle du Gaumont. En renfilant son Quechua, l’amateur d'hémoglobine peste et balance à la benne L'Officiel des spectacles. Good news: en 2010, certains New-Yorkais sont vampires pour de vrai et remplacent leur Perrier par de l’O négatif. La journée, ils sont livreurs, vendeurs, traders. Et la luit, ils sont.... vampyres.
Dans le hangar transformé en boite de nuit, des écolières en manque et des esclaves en cuir miment des scènes d’orgie romaine, sur fond de techno hardcore. Avec leurs redingotes en latex et leurs baggys trop larges, leurs hauts-de-forme victoriens et v'la les piercings, les vampyres d’aujourd’hui mélangent l’esthétique dark et le streetwear ado. Et quand minuit résonne au-dessus du dancefloor, la foule montre des crocs qu’on trouvait avant à la fin de Pif Gadget. « Être vampyre, c’est reprendre le pouvoir sur ta destinée. Le système n’est pas fait pour nous. C’est à nous de faire la différence, de montrer qu’au milieu de tout ce merdier et de toute cette hypocrisie, on peut réaliser quelque chose d’extraordinaire." T'as essayé la LCR? Et quand les gens normaux passent leurs soirées sur Chatroulette, les vampyres d'aujourd'hui occupent leurs crépuscules entre gros décibels, rituels invocateurs et transfusions sanguines. « On est 15 000 vampyres dans le monde -USA, Brésil, Japon... répartis en 500 maisons. Les maisons, c'est des clans, des genres de confrérie. A New York, t'en as plein: t'as la Panthion au Bronx, la Sahjaza au sud, les Hidden Shadows dans le Spanish Harlem... »
Les Hidden Shadows ont installé leur QG dans une école de karaté. Une fois par mois, le dojo remplace les posters de Bruce Lee par des crânes en plastoque ou des mygales en bocal: place aux soirées Bloodbath, « Bain de Sang » en anglais. A l'entrée, les videurs accueillent la foule. Parmi eux, les fondateurs des Hidden, Xanatos et Lord Zillah... Je vous ai pas trouvé sur pagesjaunes.fr, c'est normal? « Y'a de tout à ces soirées! Du son, des filles, des concours de tatouages, des concours de T.-shirt mouillés, sauf qu'on remplace la flotte par du sang. » Et le reste de l’année, les Hidden Shadows organisent des messes zar-bis en célébrant le Nouvel an le soir... d'Halloween. L'occasion aussi de recruter de nouveaux membres « On est très sélectifs sur les personnes qu'on fait rentrer dans la famille. En ce qui concerne les hommes, on veut des chevaliers, des soldats et des gentlemen. J’ai pratiqué les arts martiaux pendant trois ans. C’est une manière de conserver de la force, de la puissance au sein de notre famille. » Okééé, je vais vous laisser... Une fois dans la famille, le nouvel arrivant est initié aux poignées de main secrètes et aux règles de vie de l’Ordo Strigoi Vii, une bible vampyrique écrite il y a quinze ans par Father Sebastian, un ancien prothésiste dentaire, fondateur de la scène vampyrique « On épèle le mot vampyre avec un « y » pour nous différencier des pratiquants de jeux de rôles ou des créatures du cinéma fantastique. » Jusque là, je te suis. « Les Anciens m’ont confié la mission de parcourir le monde pour y créer des refuges où nos semblables pourront vivre sans avoir à se cacher et en paix avec le monde moderne. » En revanche, là... Dans la boutique Halloween Adventure à New York, Father Sebastian fabrique des prothèses en résine pour ses potos, des canines pointues à fixer sur les dents, comme un grill. « Tu as pleins de modèle: les Classic canines, les Double, l'Interview... » Total, les vampyres déboulent de leur cercueil en chêne massif pour se faire arranger des dentiers sur mesure, à 200 dollars pièce!
« Chacun d’entre nous possède des pouvoirs, à sa manière. Nous naissons tous avec un don. » D'après la bible vampyrique, les vampyres se rendraient compte de leur vraie nature après un traumatisme, genre la mort du cochon d'Inde deux jours avant Christmas. A partir de là, ils sont censés chercher de l'énergie et se recharger auprès d’autres humains. Rien de ouf, ils s'habillent en Dracula, rencontrent des gens, parlent avec eux et finissent au plumard. Facebook, quoi! « Certains groupes chassent le soir. Ils sortent pour pomper l’énergie des gens qu’ils croisent. Nous utilisons la communion. En échange, nous donnons du plaisir, de l’amour ou plus simplement, de l’attention. » Et quand une simple « communion » ne suffit pas, les vampyres de New York s'envoient un grand lait-fraise sorti d’une perfusion.
Dom Henrie co-présente l’émission Mad Mad House Sur Sci-Fi Channel, une télé réalité lancée en 2004: dix candidats dans une immense villa où les vampires en rut et les sorcières vaudoues remplacent « Ici la Voix ». Après neuf semaines de jeu, le dernier candidat repart avec un chèquos de 100 000 dollars. Il y a quelques années, avec son teint blafard et ses cheveux jusqu’aux fesses, Dom Henrie s'est offert un buzz en plein direct : devant les caméras, il s’enfile un verre de sang tiré des artères de Gina, sa copine planquée dans la coulisse. « Le sang est le plus beau cadeau qu’on puisse faire. Lorsque tu partages ton sang avec quelqu’un, tu partages toutes ses forces et toutes ses faiblesses. » Et tu viens de gagner... quinze jours all inclusive dans une aile de Ste Anne! Pourtant, les chefs de la scène vampyrique déconseillent à leurs membres de boire du sang à cause des maladies comme l’hépatite ou le sida. Pendant leurs soirées, des tracts circulent et demandent aux amateurs de limiter les perfusions à leur seul partenaire et d'utiliser des gants stériles. « Les crocs ne sont pas fait pour mordre. Pour boire du sang, j’utilise des cathéters, des scalpels ou des seringues et tous mes esclaves doivent passer des tests sanguins. Je conserve le sang dans de petites fioles. »
Des coutumes qui peuvent coûter cher. Nicolas C., surnommé le « vampyre de Paris », a passé huit ans en cabane à Poissy pour une affaire de meurtre il y a quinze ans. Sataniste, fasciné par le sang et les tueurs en série, il se décrit lui-même comme un vrai sataniste, en marge de la scène et des codes vampyriques. « Quand les enquêteurs ont fouillé mon appartement, ils ont trouvé des ossements humains qui pendaient au plafond, des vidéos d’horreur, des pornos SM, sans oublier les poches de sang dans le frigo. Je les avais volées à l’hôpital où je travaillais. »
En attendant, les vampyres de New York restent des pacifistes portés sur les soirées d’une sous-culture hors norme. Prochain grand rendez-vous des vampyres 2008, le 14 février pour la Saint-Valentin. Chéri, tu piques !
lundi 20 septembre 2010
lundi 13 septembre 2010
samedi 4 septembre 2010
Antifa, chasseurs de skins, par Vincent Martin (Interview publiée dans Brain-Magazine)
Quatre ans après Writers, Marc-Aurèle Vecchione, 35 ans, sort son deuxième film en DVD, Antifa, Chasseurs de Skins. Après les tagueurs, le réalisateur se penche sur les chasseurs de skins, ces bandes qui traquaient les néo-nazis dans les rues de Paris au milieu des années 80. Français de souche ou immigrés, gauchistes ou apolitiques, ils avaient tous un point commun : la haine du fascisme et une passion pour la violence.
Tolbiac Toads, Legion 88, Nazi Klan… au milieu des années 80, les skins font la loi dans les rues de Paris…
Marc-Aurèle Vecchione : En tout cas, c’est la tribu dominante à l’époque. C’est simple, si t’es punk ou gauchiste, t’évites les Halles, St Michel et les puces de Clignancourt le week-end. Pour faire simple, les bandes de fe-fas (faf en verlan, abréviation de « France aux Français », synonyme de facho, ndlr) contrôlent le 5ème, le 6ème et le 7ème arrondissement, le 13ème, le 14ème et même le 18ème. La ligne 4, avant d’être reliée à Gare du nord et Gare de l’est, est la ligne où circulent tous les ne-skis. Au total, tu trouves une dizaine de bandes de fe-fas qui se partagent Paris. Comme tu l’as dit, les Tolbiac Toads ou Légion 88, mais aussi Brutal Combat, Evil Skinner, Bunker 84. Sans parler des organisations plus politiques comme le GUD ou le PNFE. A leur tête, de près ou de loin, Batskin, un néo-nazi archi violent. Au même moment, Le Pen fait une percée, notamment aux élections européennes. On le voit à la télé dans L’heure de Vérité et les skins recrutent à mort. Tu ouvres les journaux, tu lis des agressions racistes, des descentes dans les squats ou les concerts gauchistes, des attentats contre des foyers d’immigrés… Et comme la police de l’époque regarde et laisse faire…
Une autre résistance s’organise…
Exactement ! C’est à ce moment là qu’apparaît la première bande de chasseurs vraiment organisée: les Red Warriors. Ils naissent dans un squat de Montreuil fin 85. Suivront les Ducky Boys, les Ruddy Fox, les As-Nays... des groupes qui sortent la nuit, dans les Halles ou à St Michel, et qui traquent les skins. Les gars sont reu-beus, re-nois, blancs… jeunes et très potes en dehors. Tu les reconnais à leur look : la coupe rasée sur les côtés, le bombers pour pas se faire attraper par le col, le jean retroussé, les paraboots coquées… Un look de skin en fait ! Et bien sûr les « couleurs » de chaque bande sur le blouson : symboles communistes pour les Red Warriors, drapeau américain pour les Ducky… Et puis des carrures de monstres. Les Red Warriors pratiquent tous un sport de combat, souvent à haut niveau : Kim est champion d’Europe de kung-fu, Julien est champion de France de full contact, Franck pratique aussi le kung-fu…
Jusqu’au jour où les Red Warriors passent à l’action…
Première descente, un soir à la Java, une boîte du faubourg du temple qui existe toujours. A l’époque, il y avait les soirées Acid Rendez-vous. Quelques jours plus tôt, deux Red se font embrouiller par des skins pendant une de ces soirées, « Ici, c’est chez nous… » Les Red Warriors déboulent alors à sept dans une Citroën Visa, certains sont couchés dans le coffre ! Il y a Kim, Julien, Rico… Frein à main, battes de base-ball, boom ! Les skins prennent une branlée. C’est le coup d’envoi d’une résistance anti-fasciste qui va durer plusieurs années dans les rues de Paris. Les Ducky Boys naissent ensuite avec J.F., Djamel… Ils inventent l’expression « chasseurs de skins » qu’ils taguent sur les murs de Paris et vont nettoyer les Halles.
Quand tu dis « nettoyer »…
Attention, ça cognait dur mais personne n’est jamais mort ni n’a fini paraplégique. Il y avait à l’époque une espèce de code d’honneur. Exemple, et c’est Kim qui le raconte dans le film, si un chasseur tombait sur une bande de dix skins, l’un des fe-fas disait : « Ok, je te prends en un contre un. » Si le skin se faisait mettre à l’amende et arracher ses couleurs, le chasseur repartait sans que personne ne le touche. Il n’empêche que les mecs, d’un côté ou de l’autre, se baladaient tous avec des lacrymos, des poings américains, des battes, des gants plombés, des triplex (des chaînes montées en ceinture, ndlr)… et ça cognait fort. Y’a qu’à écouter l’embrouille avec les paras qu’on raconte dans le film…
Des violences qui font le tour de la scène rock indé…
Les Berrurier Noir, groupe de rock anti-fasciste, en ont marre que des ne-skis viennent foutre la merde en concert et demandent aux Red Warriors d’assurer leur service d’ordre. Les Red répondent « ok » et plus aucun concert n’est perturbé. Même chose côté politique. Sos- Racisme vient de naître et demande aux chasseurs de coller des affiches, la nuit. Tu retrouves ensuite pas mal de chasseurs dans les manifs anti-racistes au côté du Scalp (Section Carrément Anti-Le Pen, ndlr).
Tu finis ton docu sur l’arrivée du hip-hop et du mouvement zulu en France…
On est à la fin des années 80, début 90, d’autres bandes s’organisent. Elles chassent aussi les skins mais avec un autre look : casquettes, Starter, baskets… et les chasseurs passent le relais. Le rock a disparu et le hip-hop explose. Les skins disparaissent peu à peu, laminés par les assauts des chasseurs. Les derniers se réfugient dans le kop de Boulogne au Parc des princes, c’est la fin d’une époque…
C’est difficile d’approcher des chasseurs de skins vingt ans après ?
En fait, j’étais très jeune à l’époque mais je fréquentais quelques membres des bandes. J’étais un peu une mascotte. J’en ai retrouvé certains qui ont tout de suite dit oui pour le docu. Ce sont eux qui témoignent dans le film. Ils sont toujours en contact les uns avec les autres et boivent parfois des coups. Pour le reste, j’ai épluché les archives de l’INA pour retrouver des images de l’époque. Une galère ! J’ai visionné des centaines de reportages sur les skins : TF1, France 2, France 3, pas un ne parlait des chasseurs. J’ai cherché encore et j’ai trouvé quelques perles qu’on voit dans le film.
vendredi 3 septembre 2010
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